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Pourquoi tant d’OP-AMP ? Quel OP-AMP choisir ?

17 juillet 2024

Denis Lachapelle, ing.
Francis Thiffault ing.

Introduction

Les amplificateurs opérationnels sont des dispositifs électroniques qui existent depuis plus d’un demi-siècle et qui se renouvellent constamment. Qu’est-ce qui explique cette diversité d’amplificateurs opérationnels ? Comment choisir un amplificateur opérationnel ? Les premiers amplificateurs opérationnels réalisés sur une seule puce sont apparus dans les années 1960 sous des noms comme uA702, uA709, LM101, uA741. Mais avant cela, il y avait déjà des amplificateurs opérationnels construits à partir de transistors ou de tubes individuels. Depuis, de nouveaux amplificateurs opérationnels continuent de voir le jour.

Les amplificateurs opérationnels ont un rôle simple, comme l’illustre la figure 1 : ils comportent une entrée différentielle, un gain élevé et une sortie. Mais les amplificateurs opérationnels peuvent servir à réaliser de nombreux types de blocs de circuits, tels que l’amplificateur inverseur, l’amplificateur non inverseur, le sommateur, l’intégrateur, le dérivateur, le bloc de gain non linéaire, le multiplicateur, etc.

Figure 1, Modèle d’ampli opérationnel.



Rétroaction

Comme le montre la figure 2, tous les types de blocs de circuits mentionnés ci-dessus reposent sur la théorie de la rétroaction et plus spécifiquement de la rétroaction négative. Le principe de la rétroaction négative consiste à prélever une fraction de la sortie et à la retrancher de l’entrée.

Figure 2, Rétroaction.

On peut obtenir l’équation de la sortie en faisant les calculs suivants :

Afb : Gain en boucle fermée. Vout : Tension de sortie. Vin : Tension d’entrée. Aol : Gain en boucle ouverte. β : Gain du chemin de rétroaction Quand AOL est très élevé, l’équation devient AFB ≈ 1/β. On remarque que cette équation ne contient pas AOL. Pour un amplificateur opérationnel, l’AOL correspond au gain en boucle ouverte de l’amplificateur. Donc, d’après cette équation, le gain de l’amplificateur n’influence pas la fonction du bloc de circuit si ce gain est assez grand.

Suiveur

Le circuit le plus simple qui utilise un amplificateur opérationnel est sans doute le montage suiveur, qui a un gain unitaire, comme le montre la Figure 3. Dans ce cas, β vaut 1 et le gain vaut 1 également. Quel est l’intérêt de ce circuit, s’il a un gain de 1 ?

Figure 3, Suiveur.

Ce circuit est utile car il adapte l’impédance du signal avec une impédance d’entrée élevée et une impédance de sortie faible. Par exemple, si nous voulons mesurer la tension d’un diviseur de tension et la numériser, nous ne pouvons pas connecter l’ADC directement au diviseur de tension, nous mettons un suiveur entre les deux.

Dans ce cas, nous choisissons un amplificateur opérationnel avec une impédance d’entrée élevée, bien plus grande que celle du diviseur de tension équivalent, et une impédance de sortie faible pour que l’impédance d’entrée ADC ne perturbe pas la sortie. Nous choisissons aussi un amplificateur opérationnel avec une bonne bande passante et un petit décalage DC entre les entrées plus et moins pour réduire l’erreur DC.

Avec ce circuit simple, le suiveur, nous voyons cinq paramètres importants pour un amplificateur opérationnel, le Tableau 1 les liste avec leur valeur pour trois amplis opérationnels, deux anciens (1960) et un récent (2023). Table 1, Paramètres de base de l’amplificateur opérationnel
UA702 UA741 TLV365
Gain en boucle ouverte 66 dB 94 dB 120 dB
Impédance d'entrée 50kohm 6Mohm 5pF (en anglais seulement)
Impédance de sortie 300ohm 70ohm 40ohm
Bande passante 20 MHz (Fréquence de 20 MHz) 1Mhz 50 MHz (Fréquence de 50 MHz)
Tension de décalage 0,5 mV 0,8 mV 0,4 mV

Figure 4, Paramètres de base de l’amplificateur opérationnel

On observe que l’UA702 n’a pas la même compensation que les deux autres amplis opérationnels, ce qui fait que sa bande passante de gain est beaucoup plus grande que celle de l’UA741.

En étudiant simplement le montage suiveur, nous voyons qu’un amplificateur opérationnel simple a de nombreux paramètres, nous devons les connaître tous pour choisir l’amplificateur opérationnel adapté à chaque application spécifique.

Pour minimiser l’erreur d’approximation due à la simplification de l’équation de la boucle de rétroaction négative en AFB ≈ 1 / β, il faut un gain élevé en boucle ouverte. Pour que l’entrée de l’amplificateur opérationnel n’interfère pas avec la source de tension d’entrée, il faut une impédance d’entrée élevée. Pour éviter l’erreur de gain liée à la charge sur la sortie de l’amplificateur opérationnel et le risque d’instabilité lié à la charge capacitive, il faut une faible impédance de sortie. Pour uniformiser la réponse en fréquence, il faut une bande passante élevée. Pour réduire l’erreur CC, il faut une faible tension de décalage d’entrée.

On peut donc imaginer que les fabricants cherchent à optimiser chacun de ces paramètres en fonction d’une catégorie spécifique d’applications, et qu’ils améliorent chaque année les performances de leurs amplificateurs opérationnels dans leurs différents domaines, grâce à leurs processus différents et en évolution.

Autres paramètres

Notre évaluation de chaque application se base sur de multiples critères, dont certains sont mentionnés dans les paragraphes suivants, en plus de ceux que nous avons déjà abordés.

Gain en boucle ouverte (dB)

Le gain en boucle ouverte est essentiel pour diminuer l’erreur de gain, notez que l’erreur de gain s’accroîtra avec la fréquence car la marge de gain se réduit. Notez que le gain en boucle ouverte est évalué à très basse fréquence.

Produit gain-bande passante (MHz)

Le gain en boucle ouverte a un rôle essentiel pour minimiser l’erreur de gain, il faut savoir que l’erreur de gain s’accroît avec la fréquence car la marge de gain s’amenuise. Il faut aussi savoir que le gain en boucle ouverte est évalué à très basse fréquence.

Tension de décalage d’entrée (mV, uV)

La tension de décalage d’entrée est la différence de tension continue entre les deux bornes différentielles +/-. L’objectif idéal est d’avoir une tension de décalage nulle, mais c’est irréalisable dans la réalité. La tension de décalage d’entrée se retrouve à la sortie multipliée par le gain CC en boucle fermée.

Dérive de tension de décalage d’entrée (uV/C)

La dérive du décalage d’entrée compte, surtout si vous faites un circuit pour le régler en étalonnant. Alors, le décalage est quasi nul à la température d’étalonnage, mais il augmente avec la dérive de température.

Impédance d’entrée (Ohm, pF)

L’impédance d’entrée est un critère important à considérer, le choix dépend du type d’utilisation, par exemple, si le circuit qui fournit le signal est un microphone à faible impédance, des impédances d’entrée de quelques 100 kohm seront suffisantes, pour une application comme l’électromètre qui mesure la charge, il faudra un amplificateur opérationnel avec une impédance d’entrée de l’ordre du Tohm.

Courant de polarisation d’entrée (nA, pA, fA)

Si les entrées plus et moins ont des résistances CC différentes, le courant de polarisation d’entrée peut apparaître comme une variation de la tension de sortie. La conception des circuits devrait y remédier.

Courant de décalage d’entrée (nA, pA, fA)

Bien que les résistances CC soient identiques, il y aura une différence de tension de sortie à cause du courant de décalage en entrée, mais ce décalage est habituellement bien plus faible que le courant de polarisation.

Plage de tension en mode commun d’entrée (V)

La tension d’entrée en mode commun est le domaine dans lequel l’amplificateur opérationnel fonctionne de manière attendue et linéaire, en dehors de ce domaine, le gain peut s’effondrer brutalement et dans certaines des premières versions d’amplificateur opérationnel, le gain changeait de signe. Beaucoup d’amplificateurs opérationnels ont un domaine de tension d’entrée en mode commun qui va d’un rail à l’autre et certains ont un domaine supérieur ou inférieur à un rail ou aux deux rails.

Rapport de réjection en mode commun (dB)

C’est la capacité à annuler le signal qui est présent à la fois sur les bornes plus et moins. Ce paramètre affectera la sensibilité du circuit au bruit. Un CMRR bas entraînera aussi une erreur de gain.

Bruit de tension d’entrée, densité de bruit (uV, nV/√Hz)

Le bruit de tension d’entrée peut être vu comme une source de tension de bruit entre l’entrée positive et l’entrée négative. C’est une tension ou une intensité de tension selon une fréquence.

Bruit de courant d’entrée, densité de bruit (nA, fA/√Hz)

Le bruit de courant d’entrée peut être modélisé comme une source de courant en parallèle avec les entrées positive et négative. Il représente un courant ou une densité de courant qui varie selon la fréquence. Une conception correcte du circuit permettra de réduire la contribution totale de la source de bruit de tension et de la source de bruit de courant.

Plage de tension de sortie (V)

Les amplis opérationnels ont une plage de sortie déterminée par l’alimentation et leur conception interne. Certains ne peuvent pas sortir des tensions proches des rails, tandis que d’autres le peuvent. Ceux qui le peuvent sont appelés RRIO, pour entrée-sortie rail-à-rail.

Impédance de sortie (Ohm)

L’impédance de sortie est souvent indiquée comme celle en boucle ouverte, qui varie de quelques ohms à quelques centaines d’ohms. L’impédance du circuit entier (en boucle fermée) dépend de la topologie, c’est environ l’impédance de la boucle ouverte divisée par la marge de gain. L’impédance en boucle fermée augmente avec la fréquence car la marge de gain diminue.

Courant de sortie max (mA)

Le courant de sortie max est le courant le plus élevé que l’amplificateur opérationnel peut fournir sans sacrifier sa linéarité, au-delà de ce courant, il peut y avoir une diminution du gain en boucle ouverte et une distorsion.

Vitesse de balayage (V/us)

La source de courant interne de l’amplificateur opérationnel qui charge le condensateur interne formant le pôle dominant limite la vitesse de balayage. La vitesse de balayage est donc liée au produit gain-bande passante. La limitation de la vitesse de balayage peut provoquer une distorsion pour les signaux de forte amplitude et de haute fréquence. Par exemple, si l’on utilise l’amplificateur opérationnel pour générer une onde carrée, le front de l’onde carrée sera affecté par la vitesse de balayage maximale de l’amplificateur opérationnel.

Courant d’alimentation (uA, mA)

Le courant d’alimentation nécessaire à un amplificateur opérationnel varie de quelques uA à quelques centaines de mA. En général, plus le produit du gain et de la bande passante est important, plus le courant d’alimentation est important. Les amplificateurs opérationnels qui consomment très peu de puissance ont un produit du gain et de la bande passante faible.

Tension d’alimentation (V)

La puissance peut varier de un ou deux volts à plus de cinquante volts pour certains amplificateurs opérationnels.

Rapport de réjection de la tension d’alimentation (dB)

Le rejet de mode commun alimentation est la mesure de la variation du décalage d’entrée causée par le bruit sur les rails de tension d’alimentation. Il indique comment le gain en boucle ouverte diminue avec ce bruit. En continu, c’est le quotient de la variation du décalage d’entrée et de la variation de tension d’alimentation. Le rejet devient moins bon quand la fréquence augmente.

Température de fonctionnement (C)

La température de fonctionnement est l’intervalle de température recommandé dans lequel l’amplificateur opérationnel peut fonctionner sans risque de panne. Remarquez que l’utilisation d’un amplificateur opérationnel à la température de fonctionnement maximale ou proche de celle-ci diminuera sa longévité.

Cotes maximales absolues

L’amplificateur opérationnel ne doit pas être utilisé au-delà de certaines limites pour éviter de l’endommager. Par exemple, il faut respecter la tension maximale sur les rails d’alimentation, la température maximale de jonction et toutes les autres contraintes.

Quelle est l’utilité de tant d’amplis opérationnels ?

Les applications différentes demandaient des configurations différentes. Par exemple, pour le suiveur dont nous avons parlé plus haut, nous pouvons vouloir réduire l’erreur DC entre l’entrée et la sortie. Dans ce cas, nous cherchons une petite tension d’entrée décalée. Ou nous pouvons vouloir une bande passante assez large pour minimiser l’erreur jusqu’à 1Mhz. Il y a des amplificateurs opérationnels avec une tension de décalage d’entrée de moins de 1uV à environ 10mV et une bande passante de quelques kilohertz à quelques centaines de mégahertz.

Seulement 5 valeurs dans chaque dimension et on obtient 25 variétés. Et c’est juste pour deux paramètres et un fabricant. On comprend facilement qu’il existe plusieurs centaines de variétés d’amplificateur opérationnel. Notez que les paramètres sont un peu liés. Je veux dire qu’on ne peut pas les régler tous indépendamment. Par exemple, le produit de la bande passante et du gain et la consommation de courant sont liés, car pour une bande passante plus haute, le transistor a besoin de plus de courant de polarisation. En allant sur le site Web d’un distributeur et en choisissant un amplificateur opérationnel à usage général, vous verrez qu’il existe des milliers d’amplificateurs opérationnels différents, et que les fabricants en sortent un nouveau modèle chaque année depuis plus d’un demi-siècle !

Quel ampli opérationnel choisir ?

Il n’existe pas de réponse simple et universelle à cette question. Cela dépend de l’application, notamment de son environnement, et du compromis entre tous les paramètres, y compris le prix et la disponibilité.

Nous devons tout d’abord déterminer le niveau de qualité requis pour le produit, selon qu’il appartient à la catégorie commerciale, industrielle, automobile, militaire, médicale ou spatiale.

Nous devons ensuite restreindre notre recherche aux produits qui correspondent à cette catégorie. Il faut noter que le choix se réduit considérablement entre la catégorie commerciale et la catégorie spatiale, où le nombre de produits est très limité et les coûts sont très élevés. Ensuite, nous devons prendre en compte les paramètres les plus critiques tels que la tension d’alimentation, la bande passante, la tension d’offset d’entrée, le courant de polarisation d’entrée, la vitesse de balayage si le signal de sortie est important et, bien sûr, le coût si l’application est sensible au budget. Vous devrez peut-être aussi vérifier la plage du mode commun d’entrée, un paramètre qui est souvent oublié.

Il existe aussi des paramètres non techniques tels que le coût et le fabricant (certaines entreprises préfèrent travailler avec un nombre restreint de fabricants pour des raisons stratégiques).

Le tableau suivant peut vous aider à noter les valeurs de paramètres souhaitées avant de commencer la sélection, si l’application nécessite d’autres paramètres, vous pouvez les ajouter à la liste.
Paramètres Valeur Unité
Catégorie
Type de montage
Tension d'alimentation
Bande passante
Tension de décalage d'entrée
Dérive de tension de décalage d'entrée
Courant de polarisation d'entrée
Courant de décalage d'entrée
Vitesse de balayage
Plage de mode commun d'entrée
Plage de tension de sortie
Courant d'alimentation

En terminant

Dans cette note, nous présentons les différents types et paramètres d’amplis opérationnels pour diverses applications, nous expliquons pourquoi il y a toujours de nouveaux amplis opérationnels chaque année malgré leur simplicité, et nous proposons une méthode facile pour choisir l’ampli opérationnel adapté à une application.

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